Salah Ben Omrane le mardi 13 mars 2012 à 02:30
Le Vol Air France AF443, un Boeing 777, a décollé de Rio de Janeiro le 11 mars 2012 à 17H20 heure locale. Il a atterri le lendemain à l’aéroport parisien Charles de Gaulle, terminal E , à 08H03.
Ce matin là du 12 mars 2012 , la police de l’air et des frontières lors du contrôle des passagers ,s’est aperçue que le nom de la passagère Saïda Agrebi figure sur la liste des personnes contre qui, un mandat d’arrêt international avait été émis par la Tunisie. Mme Agrebi a été interpellée puis placée dans un centre de détention, conformément aux vœux de l’État tunisien requérant, dans l’attente qu’elle soit déférée devant un magistrat français qui devra lui signifier la mesure de son extradition suivant une convention bilatérale entre la Tunisie et la France du 28 juin 1972 . Cette même convention se conjugue avec les articles 696 et suivants du code de procédure pénale français.
Que ceux qui croient que les magistrats français vont la mettre dans un avion puis la renvoyer en Tunisie, fissa, que ces magistrats sont »naturellement » dans le prolongement de la magistrature tunisienne, ne se réjouissent pas trop vite. On peut leur annoncer qu’un feuilleton vient de commencer. Mme Agrebi usera certainement de tous ses moyens pour faire échec à cette extradition en revendiquant ses droits .
Du côté de la Convention bilatérale entre la Tunisie et la France, il est mentionné dans l’article 17 ceci : « Il est donné suite à la demande de comparution de témoins détenus sous la condition de maintenir en détention lesdits témoins et de les renvoyer à bref délai. »
Cela signifie quoi ?
Cela signifie tout simplement pas de détention abusive. En France, maintenant, on ne plaisante pas avec les droits de chaque individu en matière de détention préventive. Madame Agrebi est en droit d’organiser sa défense dès la première heure de sa détention avec un avocat. Cette même détention sera limitée dans le temps. Cela signifie également que si le dossier du pays requérant n’est pas bien ficelé, La France, État requis, ne peut pas détenir Mme Agrebi contre sa volonté. La loi française la protège contre toute extradition abusive Qu’elle pourra dire « lâa », même quand la police française lui promettra deux bracelets en or, 24 carats, bien soudés jusqu’à l’aéronef.
Le même article cite les cas ou le transfèrement vers la Tunisie peut être refusé :
« a) Si la personne détenue n’y consens pas ;
b) Si sa présence est nécessaire en raison d’une procédure pénale en cours sur le territoire requis ;
c) Si son transfèrement est de nature à prolonger sa détention ;
d) Si d’autres considérations impérieuses s’opposent à son transfèrement sur le territoire de l’État requis. »
Il faut s’attendre qu’elle s’oppose à son transfèrement , si ce n’est pas déjà formulé. Elle pourra évoquer les réserves de (a et d ). Donc,elle dira qu’elle n’y consens pas et le magistrat qui l’entendra lui demandera : pour quelle raison ? Il faut s’attendre qu’elle réponde qu’elle était partie librement du pays , que ce n’était pas une fuite, que le mandat de son point de vue ,soit injustifié dans ces circonstances , qu’elle dise que son affaire est politique et pour finir ,qu’elle ajouterait qu’elle ne fait plus confiance à un pays où les Salafistes font la loi et que l’envoyer dans ce pays, cela équivaut à l’envoyer dans un enfer. Il faut s’attendre à entendre tous ces arguments qui constitueraient sa ligne de défense pour faire obstruction à la demande d’extradition.
Que dit la loi française , chose qui ne va pas faciliter son extradition ?
L’article 696 dit ceci :« L’extradition n’est pas accordée :
1° Lorsque la personne réclamée a la nationalité française, cette dernière étant appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise ;
2° Lorsque le crime ou le délit à un caractère politique ou lorsqu’il résulte des circonstances que l’extradition est demandée dans un but politique ;
3° Lorsque les crimes ou délits ont été commis sur le territoire de la République ;
4° Lorsque les crimes ou délits, quoique commis hors du territoire de la République, y ont été poursuivis et jugés définitivement ;
5° Lorsque, d’après la loi de l’État requérant ou la loi française, la prescription de l’action s’est trouvée acquise antérieurement à la demande d’extradition, ou la prescription de la peine antérieurement à l’arrestation de la personne réclamée et d’une façon générale toutes les fois que l’action publique de l’État requérant est éteinte ;
6° Lorsque le fait à raison duquel l’extradition a été demandée est puni par la législation de l’État requérant d’une peine ou d’une mesure de sûreté contraire à l’ordre public français ;
7° Lorsque la personne réclamée serait jugée dans l’État requérant par un tribunal n’assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense ;
8° Lorsque le crime ou le délit constitue une infraction militaire prévue par le livre III du code de justice militaire. »
En attendant, les autorités françaises, en cas de prévision d »échec de la demande d’extradition émise par la Tunisie, vont devoir faire appel à leur imagination. Un terminal n’est pas forcément un terminus dans le parcours d’une vie pleine d’émotions !
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