Amel Karboul, ministre du tourisme, rejette la faute sur des « timbrés »

Salah Ben Omrane  15/07/2014  10:50

Amel Karboul photo Cap Fm

Amel Karboul photo Cap Fm

  Dans son témoignage recueilli par Hédi Hamdi sur le site de Destination.Tunisie. info hier, Amel Karboul, ministre chargée du tourisme reconnaît qu’elle « est derrière le timbre à 30 dinars » *, une taxe dont devrait s’en acquitter toute personne non résidente, à la sortie du territoire tunisien.

 Toujours au cours du même entretien, elle s’est exprimée sur sa propre prévision de sept millions d’entrées de touristes en Tunisie en l’année 2014. Chiffre qu’elle même soutenait, non sans fierté, et publiquement. Or aux dernières nouvelles, toujours au cours de l’entretien d’hier, ce fut un à moteur les hélices et à toutes voiles baissées :  » Au début, je ne voulais pas utiliser ce chiffre et je l’ai même trouvé débile. Je m’excuse pour le terme. Car ce chiffre n’était basé sur aucune donnée réelle. Mais j’ai joué le jeu avec tout le monde, sans grande conviction. Nous avons fait récemment une étude d’impact auprès de 4 pays émetteurs pour mesurer l’image de la Tunisie qui s’est révélée nettement négative. »

Voici une des séquences, où elle ne manquait pas de conviction, lorsqu’elle « répétait ce qui lui a avait été soufflé », devrait-on dire, puisque depuis hier, il ne faut plus prendre ce qu’elle dit pour argent comptant :

Quel drôle de rétropédalage !

  Passons sur l’amabilité envers celui ou ceux qui lui ont soufflé la prévision qu’elle semble devoir répéter et qu’elle trouve « débile ». Sympa comme accusation pour les collaborateurs qui fourguent de la matière toxique à une spécialiste de la communication. Il demeure néanmoins un os. Il consiste au fait que la même ministre, lors d’une des interviews où elle avait été drôlement déstabilisée par le journaliste d’Al Arabia, il y a quelques semaines, elle avait soutenu le contraire de ce qu’elle tend à vouloir accabler ceux qui, l’avaient prétendument, poussée  à l’annonce d’un chiffre dont elle n’était pas convaincue : « Ma personnalité ne me permet pas de changer de langage parce que quelqu’un veut m’influencer. »

Voici la vidéo où elle parle de la force de sa personnalité non sujette à de l’influence :

Alors, influencée ou pas influencée ?

La question du jour : Est-ce que c’est elle, véritablement, derrière la taxation de ceux qui quitteront la Tunisie ou va-t-elle nous faire l’aveu,  une fois que la taxation serait mise sur les rails, qu’encore, c’est une mesure « débile » et qu’elle prétendrait qu’elle était « forcée » de dire le contraire de sa profonde conviction ?

Nous l’affirmons et le réaffirmons , cette taxation serait contraire aux intérêts du tourisme en Tunisie, qu’elle serait même préjudiciable !

  Qu’une telle taxation ternirait l’image de la Tunisie car elle serait perçue par les potentiels  désireux de se rendre en Tunisie, en une condition bureaucratique, comme elle se pratique couramment et exclusivement dans les pays du tiers monde. Les pays modernes sont assez habiles pour prendre l’argent des touristes. Ce sont les pays où il n’y a rien qui peut attirer les touristes en faisant pleurer leurs porte-monnaie qui se réfugient dans cette taxation.  

  Faire une proposition de ce genre de taxation, pour une ministre du tourisme, c’est avouer son inefficacité et sa faiblesse dans l’exercice de la charge qui  lui a été allouée, à savoir rendre attractives aux yeux des touristes, les activités et les sources de gains nationales, qui sont par ailleurs les rouages économiques sains et pourvoyeurs de taxations et sous formes diverses. 

  A-t-on besoin encore d’un ministère du tourisme et de milliers d’employés affiliés à ce ministère, dans l’éventualité ou une taxation de ce genre verrait le jour, puisque tous peuvent aller se reposer, et que l’État se contenterait d’investir dans du papier et de la colle pour fabriquer des timbres ? Soyons sérieux, les sources potentiellement aptes à faire dépenser de l’argent aux touristes, il en existe en Tunisie. Mieux, c’est avec joie voire en se précipitant pour dépenser leur argent que les touristes devraient s’y employer quand les offres et services qui leurs sont proposés sont accessibles et sont bien présentés. C’est dans cette direction et dans la voie de l’organisation et de la valorisation des offres qu’on attend que les politiques, qu’ils soient, technocrates, idéologues, politologues de pure souche ou tout ce qu’ils veulent endosser comme appellation, de faire des efforts pour agir sur le tissu économique du pays. Trop facile d’ordonner à des agents de collecter des timbres fiscaux  à la sortie du territoire. C’est une opération porteuse d’un message négatif sur tous les acteurs de l’économie nationale, comme si ces derniers étaient incompétents dans les échanges de valeurs avec les touristes lors de leurs séjours et que par le timbre fiscal à 30 dinars payé à la sortie, l’État se rattrape sous forme d’un ticket correspondant à un manque à gagner. Elle est néfaste pour l’image de la Tunisie. Un pays qui n’a besoin ni d’aumône ni  de pénalisation des touristes. Faut-il être technocrate pour laisser échapper toutes ces considérations ou être technocrate est un grade dans la famille des bureaucrates?

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* Traduction du projet de la taxation qui figure dans le projet de loi de finances complémentaire : « Création d’un timbre fiscal à la sortie du territoire tunisien des personnes non résidentes d’un montant de 30 dinars en parallèle de la suppression de la taxe de séjour dans les hôtels. « 

 

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