Salah Ben Omrane 21 juin 2015 22:45
Doit-on parler d’essoufflement des arguments juridiques ou doit-on se contenter de dire qu’il n’y a pas eu d’arguments du tout, face à la charge et en recours près du tribunal administratif de Tunis, des personnes dont les fonds et biens ont été confisqués par le décret présidentiel du 14 mars 2011 ?
Dieu seul le sait ! Depuis vendredi dernier, il est rapporté par la presse que le président de la République a fait appel à l’arrêt du Tribunal administratif qui avait rendu nul le décret en question n°13-2011.
Cependant, les faits sont têtus et à ce jour on n’en sait rien sur la fantomatique pertinence de la riposte administrative de l’exécutif devant les arguments adverses, ceux des demandeurs dans la nouvelle peau d’intimés.
Il ne suffit pas de faire appel, juste pour plaire à ceux qui auraient souhaité que le politique l’emportasse (désolé, j’y tiens) sur le juridique ou contenter ceux qui avaient juré qu’il y aurait des tonnes et des kilomètres de handicaps pour que l’exécution de la récente décision du tribunal administratif ne verrait jamais le jour.
Aux convertis des tenants de cette dernière mentalité, qui sont pourtant bien nombreux, il y a juste à rappeler que les mêmes causes engendrent les mêmes effets. L’histoire a le vice de bégayer. Comment jadis, il y a encore que cinq ans, certains se permettaient (tout est relatif) de désapprouver, de critiquer et de condamner les violations à la loi, les entorses aux procédures régulières, le népotisme, l’arbitraire, le déni de justice et soutenir aujourd’hui, en disant au passage que ce n’est pas la rougeole qu’ils ont attrapée, que ce qui ne se donne pas par la loi s’arrache par la ruse et avec un équipage de manœuvriers.
Je suis curieux de savoir quels fondements juridiques seraient mis en place par l’appelant pour relancer le débat. Force étant à la loi, il est une erreur d’opposer le droit à la politique. La question où s’arrête le droit et où commence la politique, n’a pas de sens sauf, bien entendu, si nous considérons que les politiques sont des mauvais joueurs et ce qu’ils ne peuvent pas attraper à la régulière, ils estiment que pour la soi-disant bonne cause, ils se permettent seuls à s’autoriser des coups de pouce. Oui c’est bien la logique mafieuse !
Il faut bien qu’un jour le cercle vicieux se brise et que la Tunisie puisse se targuer qu’elle est dotée d’une justice indépendante à l’écart des influences et des humiliations des magistrats.
Le rafistolage ne tient pas pour longtemps. La preuve ! Si seulement il y avait eu une commission de contrôle des actes administratifs et le décret en question en est bien un, l’histoire aurait été différente, avec moins de violations à dénoncer et certainement moins de dégâts et un moindre festin pour les chasseurs et coureurs sans scrupules des biens non surveillés.
Aucune information n’a filtré sur la réponse de la présidence de la République au recours qui avait été déposé au tribunal administratif. L’opacité, cette maladie endémique qui attaque tous ceux qui parviennent à se mettre au pouvoir en Tunisie, ceux-là qui ont pour mission de conduire les affaires du pays, semble difficile de s’en débarrasser. Elle colle aux pattes. Elle est ravageuse. Elle choisit ses cibles. Elle était présente hier, avant hier et elle est encore là, Elle nargue encore aujourd’hui. Elle fait des victimes et l’État en est la première. Pour le vérifier, il suffit de tenter de s’informer sur les affaires publiques en cours, c’est à dire vouloir être au courant des actions qui se font au nom de l’État, qui engagent chacun et tous, pour constater les dégâts et apprécier la compétence en la matière de ceux qui se bousculaient, encore il y a encore quelques semaines pour faire partie des gens à pouvoir, les gouvernants.
Je me suis permis de traduire en français la requête (supposée) des requérants qui avaient obtenu gain de cause en première instance. Qu’a pensé l’autorité qui devait y répondre et qu’avait-elle répondu aux arguments étayés ? Nous ne le savons pas ! Peut-être que nous le saurons un jour et peut-être que nous comprendrons comment les juges administratifs ne pouvaient pas faire autrement que de prononcer la recevabilité du recours et en prime la nullité du décret :
[Tunis, 10 mai 2011
Recours Pour Excès de Pouvoir
Pour : 9 Demandeurs
Contre : Le président de la République provisoire au palais de Carthage.
Objet : Recours pour excès de pouvoir contre le décret n°13 -2011, émis le 14 mars 2011 se rapportant à la confiscation des fonds et des propriétés des biens meubles et immeubles.
Exposé à monsieur le Président du tribunal administratif de Tunis, que Dieu préserve, ce qui suit :
Que ce décret énonce dans son premier article, « Sont confisqués au profit de l’État tunisien, conformément aux conditions citées dans le présent décret, le jour de son émission, tous les fonds et biens meubles et immeubles ainsi que les droits acquis après le 07 novembre 1987, qui s’attribuent à l’ancien président de la République tunisienne .., de son épouse …, du reste des personnes désignées sur la liste adjointe au présent décret. ainsi que les autres dont il sera éventuellement déterminé leurs acquisitions de fonds ou de propriétés des biens meubles ou immeubles ou des droits en conséquence des relations avec ces personnes. La confiscation décidée, conformément au présent décret, ne touche pas aux droits des emprunteurs qui réclament le remboursement de leurs emprunts en conséquence ce, avant le 14 janvier 2011 afin que cela puisse se faire suivant les mesures fixées par les dispositions de ce décret.«
Que le décret cité, a nuit à l’un des sacrés des droits de l’homme, si ce n’est le droit de la propriété.
Que le décret a excédé et abusé de son autorité quand il a pris une telle décision.
Que l’opposition à ce décret est prête légalement devant le tribunal administratif car, à la date de sa présentation en recours qu’il a été décidé administrativement nul, s’il n’est pas inexistant, compte-tenu de l’inexistence du fondement juridique (première opposition), de la violation des dispositions de l’article 28 de la constitution (deuxième opposition), de l’excès d’autorité, de la violation des dispositions de l’article 5 du Code Pénal, de la transgression de la présomption d’innocence (troisième opposition), de la violation des dispositions sur le droit de la propriété, des fondements de la justice et de l’équité (quatrième opposition).
Première opposition : Caducité du décret pour extinction de légalité.
Qu’il est parvenu au préambule du décret critiqué, ceci : « Le président de la République provisoire,
Sur proposition du ministre des finances,
Après consultation de l’avis du ministre de la Justice,
Et l’avis du ministre des propriétés de l’État et des affaires immobilières,
Et l’avis du gouverneur de la Banque Centrale Tunisienne,
Il est émis le décret dont l’énoncé qui suit… »
Qu’il est à remarquer que ce décret n’a pas indiqué, nullement, les deux articles 28 et 57 de la Constitution ni la loi n°5 de l’année 2011, en ce qui concerne la procuration au président provisoire de la République l’émission des décrets, pourtant le présent décret a été émis à une date antérieure de la fin des fonctions du président provisoire de la République au cours de la période constitutionnelle limitée.
Que ces textes représentent le fondement légal permettant au président de la République d’émettre des textes dans des domaines qui relèvent du droit de regard du législateur.
Que tous les décrets, presque, émis avant le 15 mars 2011, sauf le décret contesté, formulent ouvertement, les deux articles et la loi citée ci-dessus.
Que nous signalons, à titre de rappel sans s’y attarder, que le décret n° 9 de l’année 2011 du 28 février 2011, qui concerne des mesures spécifiques pour le soutien des entreprises économiques afin qu’elles poursuivent leurs activités, il est disposé dans son préambule ceci : « Le président de la République provisoire,
Sur proposition du ministre de l’industrie et de la technologie,
Après consultation des articles 28 et 57 de la Constitution
Et de la loi n° 5 de l’année 2011 du 28 février 2011, en ce qui concerne la procuration au président provisoire de la République, d’émettre des décrets, suivant l’article 28 de la constitution,
Il est émis le présent décret avec l’énoncé suivant … »
Que l’absence d’énonciation sur le bien-fondé légal du décret n° 13 , objet du présent recours, apparaît en harmonie avec les déclarations émises par le président provisoire de la République ainsi que celles du président provisoire du gouvernement, en ce qui concerne la suspension de l’usage des dispositions de la Constitution de 1959, surtout celles qui se rapportent à l’autorité législative.
Que l’absence d’énonciation du bien-fondé légal du décret contesté, interroge d’elle même sur bien des questions à propos de la légalité légitime de ce décret, en l’absence du dispositif textuel qui devrait lui permettre une assise, du point de vue légal, et qui autorise le président de la République de l’émettre. Par ailleurs, le décret n° 14 de l’année 2014, concernant l’organisation provisoires des autorités publiques, qui a remplace de manière provisoire l’ancienne constitution en matière d’organisation des pouvoirs publics, dans le but de faire émerger une nouvelle constitution d’une assemblée constitutionnelle nouvelle, présumée élue et qui permet au président provisoire de la République l’émission de nouveaux textes à caractère législatif, sous forme de décrets qu’il promulguera après leurs discussions au sein du Conseil des ministres.., il a précisé explicitement que ses dispositions entreraient en vigueur à partir du 15 mars 2011, c’est à dire, à une date qui vient après l’émission du décret n°13, objet du recours.
Que si nous considérons que cette absence s’attribue à l’omission, ceci soulève un embarras sur la dimension du respect des contraintes de la loi sur la procuration par le décret. La confiscation étant une condamnation complémentaire, suivant l’article 5 du C.P, l’article 34 de la constitution en fait état, avec précision, que les condamnations pénales sont du ressort du législateur et non autrement. Dans la mesure où la loi sur la procuration n’a pas chargé le président provisoire de la République sur la fixation des condamnations, en s’y substituant ainsi, le décret n° 13 contesté a été émis hors cadre de la procuration . Ceci, lui ôte tout aspect législatif et le décret contesté se retrouve dépourvu de tout bien-fondé légal.
Que toutes les défaillances parvenues dans le décret contesté peuvent s’expliquer par l’état de précipitation et de frémissement qui ont caractérisé l’émission de ce texte malgré sa dangerosité et son atteinte à un des droits fondamentaux de l’homme qui est le droit à la propriété, ce qui invite à l’obligation de le faire cesser pour éviter les conséquences négatives qui pourraient en résulter de son exécution.
Deuxième opposition : Nullité pour violation des dispositions de l’article 28 de la constitution.
Qu’il est paru le décret éraillé le 14 mars 2011.
Qu’en supposant qu’a été oublié le rappel des articles 28 et 57 de la Constitution et la loi n°5 de l’année 2011 en ce qui concerne la procuration, il est que le décret critiqué demeure nul.
Que si nous considérons que le décret s’est, effectivement, fondé sur les articles 28 et 57 de la Constitution, lequel a été cessé d’y faire usage après la date du 17 mars, il n ‘obtient, pour autant et malgré cela, aucune légitimité de légalité.
Que la jurisprudence et la jurisprudence tunisienne comparées, considèrent que le décret a été décidé administrativement, dès lors qu’il n’a pas terminé les procédures pour son adoption en conformité avec les exigences de la Constitution.
Que ces mesures énoncées dans la Constitution n’ont pas été respectées et a expiré le délai pour les respecter, ce qui rend la décision contestée nulle et dépourvue pour exister légalement.
Que sans les mesures réglementaires ,que celle-ci étant violées, le décret en citation, s’est dirigé vers la perte de la légitimité de la loi.
Que ces mesures se représentent dans les impératifs constitutionnels suivantes :
Premièrement : Qu’une copie du décret soit déposée au lieu de l’assemblée des députés dans un délai limité. Ce commandement n’est pas ce qui est déterminé ni déclaré.
Deuxièmement : S’il y a lieu l’adoption du décret dans un délai prévu suivant l’article 28 de la constitution, sur ce fondement il est adopté.
Qu’il y a dans le cinquième paragraphe de cet article, ceci : « À l’assemblée des députés et à l’assemblée des conseillers de donner procuration dans un délai limité et dans un but précis au président de la République, l’émission de décrets qu’il présente suivant l’état à l’approbation de l’assemblée des députés ou aux deux assemblées, ceci après l’expiration du délai précité ».
Qu’il est désigné par délai, en référence au texte du paragraphe précédant, la durée que fixe l’assemblée des Députés dans la loi sur la procuration.
Qu’il y a dans l’article premier de la loi n°5 -2011 du 09 février 2011, en ce qui concerne la procuration du président provisoire de la République d’émettre des décrets conformément à l’article 28 de la constitution, il y a ceci : » Suivant les dispositions de l’article 28 de la constitution, il est autorisé au président provisoire de la République d’émettre des décrets à partir de la parution de cette loi au journal officiel de la République Tunisienne jusqu’à la fin de ses missions... ».
Que cette durée est finie à la fin de la durée présidentielle limitée à la date du 17 mars 2011.
Que cette durée est finie sans que ne se produise l’adoption légale du décret.
Que la chambre des député ainsi que celle des conseillers ont été dissoutes conformément au décret n° 14-2011 du 23 mars 2011 qui concerne l’organisation provisoire des autorités publiques, dans lequel , il est fait état dans son article premier, ceci : » Sont dissoutes conformément à ce décret les assemblées suivantes: l’assemblée des députés et l’assemblée des conseillers…l’assemblée économique et sociale et l’assemblée constitutionnelle… » .
Que par l’exigence d’arrêter l’activité suivant la constitution, la dissolution des assemblées des députés et des conseillers, l’opération de l’adoption du décret en contestation s’avère impossible.
Que le décret critiqué est devenu une décision administrative nulle car elle n’a plus de fondement constitutionnel ni légal.
Que Bertrand Pauvert, juriste français, à propos de cette circonstance, soutient ceci : « À l’issue du délai d’habilitation, on est en présence d’une catégorie d’actes à valeur réglementaire susceptible en que tant tels d’annulation par la juridiction administrative ».
L’ensemble des juristes français dans le droit constitutionnel se sont accordés sur ce qui suit:
« La valeur juridique du décret-loi varie. Ayant été pris par le gouvernement, et avant sa ratification par le parlement, le décret loi est un acte réglementaire, contrôlée donc par le juge administratif. Un décret en Conseil d’État et Conseil des Ministres peut alors modifier ses dispositions. Les ordonnances doivent faire l’objet d’un projet de loi de ratification déposé devant le Parlement avant l’expiration du délai indiqué dans la loi d’habilitation. À défaut, elles deviennent caduques. Le projet de loi peut ne pas être voté, les ordonnances seront appliquées.Toutefois, la Constitution n’impose pas que le projet de loi de ratification déposé soit inscrit à l’ordre du jour des assemblées parlementaires. Tant qu’elle n’est pas ratifiée, l’ordonnance conserve une nature réglementaire. Après ratification , l’ordonnance devient de nature législative«
Que de même, les juristes tunisiens sont en accord sur le fait qu’un décret qui n’a pas été adopté dans les délais, perd sa valeur juridique. Il se rend nul et sans aucun effet.
Que dans cette circonstance, le Professeur Habib Ayadi a soutenu ce qui suit :
« l’article 28 fait enfin obligation au Président de la République de déposer devant l’assemblée nationale, les projets de loi de ratification à l’expiration du délai d’habilitation. Il convient de souligner cependant que le dépôt des projets de loi de ratification n’est qu’une simple formalité que le Président de la République a intérêt à respecter sinon son décret-loi devient caduc. En revanche, le dépôt des projets de ratification dans les délais, perpétue les effets juridiques de l’acte… La caducité implique qu’en cas de non dépôt dans le délai, le décret perd sa force juridique à compter de l’expiration du délai au cours duquel le projet de ratification aurait dû être déposé… Seule la ratification parlementaire convertit ces décrets-lois en lois ordinaires et les soustrait par conséquent, au contrôle du juge« .
Que de même le Professeur Yadh Ben Achour a soutenu ce qui suit :
« Les mesures prises sur la base de l’article 28 sont de nature réglementaire jusqu’à leur ratification par l’Assemblée… Le décret-loi est conditionné par l’autorisation de l’Assemblée et par l’exigence d’une ratification de cette même assemblée… Par cette ratification, élément essentiel de la validité des décrets-lois, l’assemblée fait sienne les mesures prises par le gouvernement. Elle leur donne force de loi …(lorsque) l »exécutif s’abstient de déposer à temps un projet de loi de ratification,. la thèse habituellement admise est celle de la caducité du décret-loi à compter du jour où la demande de ratification aurait dû être déposée. Nous admettrons , au contraire, la nullité abinito de l’acte. Car nous sommes certain que la ratification n’aura pas lieu, et ceci à cause d’une omission inconsciente ou voulue de l’exécutif... »
Qu’il est une certitude, à l’instant du recours, que le décret contesté n’a pas été adopté suivant les délais légaux. Qu’ainsi, son adoption est devenue impossible à l’incidence de la dissolution du Parlement. Ce décret est devenu caduc et dépourvu de toute légitimité.
Que la confiscation s’est constituée sur un décret caduc. La base légale exige que tout ce qui est construit sur du faux, il est faux à son tour et que le faux ne dresse aucune trace de légalité.
Troisième opposition : Nullité pour excès d’autorité, violation des dispositions de l’article 5 du C.P. et transgression de la présomption d’innocence.
Que le décret contesté s’est présenté en se consacrant à l’excès d’autorité, en opposition aux principes fondateurs du droit à la propriété dans la législation tunisienne.
Que l’excès d’autorité et la transgression des principes qui réglementent le droit à la propriété, sont manifestes dans le sens de la confiscation qu’a adopté le titulaire du décret contesté.
Que ce sens est réfutable en droit car, il est quasiment totalitaire, n’obéissant à aucune contrainte premièrement, et deuxièmement, il est en infraction au sens de la confiscation dans la loi nationale en cours depuis l’indépendance.
Le sens totalitaire :
Qu’il n’y a pas de doute que l’article 17 du C.D.R. a adopté le sens de la loi en moyen parmi d’autres pour acquérir de la propriété.
Que ce moyen est contraint par deux obligations :
→ Pas d’arbitraire dans son usage
→ Le respect du droit de la propriété au titre de droit constitutionnel
Le sens légal:
Que le législateur a utilisé le terme confiscation depuis l’année 1913, inclus dans le Code Pénal.
Que l’essence du terme a été adoptée dans une seconde période dans diverses lois particulières.
Qu’après consultation de tous ces textes législatifs, il est à remarquer :
→ La signification de « Confiscation » est réduite au sens de la punition, à savoir pénale. Et autant que toute punition, la confiscation des propriétés nécessite la commission d’un type d’acte par le titulaire de ces propriétés justifiant l’application de la confiscation.
→ La signification de « Confiscation » peut être prise dans le sens d’une condamnation complémentaire ou dépendante. Elle s’ajoute en complément à une condamnation principale prononcée à l’égard du titulaire des propriétaires confisqués. Il existe de la confiscation qui s’attèle à la condamnation en lui demeure attachée, qui existe au cours de son existence et qui disparaît avec sa disparition ou qui pourrait lui être corollaire. Le Code Pénal a adopté ce sens de la confiscation dans le contenu de l’article 5, puisque dans le second paragraphe de cet article , il est a été disposé ceci : « Les condamnations complémentaires sont : …. 4 – La confiscation des biens dans les cas exposés par la loi... »
Qu’il résulte de ceci, que la confiscation des propriétés exige qu’il y ait eu la mesure d’une condamnation principale par une juridiction spécialisée en charge d’un fait incriminant attribué au titulaire des propriétés qui pourraient être confisquées.
Qu’il n’existe pas dans notre législation un sens indépendant à la confiscation et que celle-ci ne peut être évoqué qu’en étant liée à une condamnation principale prononcée.
Que par l’attribution d’une quelconque indépendance à la confiscation, s’avère une transgression du principe législatif sur les crimes et les condamnations, énoncé dans l’article 13 de la constitution.
Que le sens de « la confiscation » dans notre législation est très loin du totalitarisme et de l’absolutisme , deux caractéristiques qui rendent le décret contesté, administratif, violent et arbitraire.
Qu’il en résulte de cela, que le décret a envahi un domaine dont le droit de regard relève de la spécialisation de la justice et pas autrement qu’elle. Il est le domaine des condamnations pénales. Car, le domaine sur lequel il est convenu juridiquement, par la loi et suivant la jurisprudence, est que la confiscation des biens est une condamnation complémentaire qu’un juge pénal émet et que cette condamnation doit intrinsèquement être rattachée à un jugement pénal principal prononcé à l’encontre de la personne concernée par la confiscation.
Qu’en consultant les dispositions du Code Pénal, il apparaît l’existence de nombreux cas de figures auxquels le juge peut être amené à prononcer, la confiscation, tels le cas des délits commis par les fonctionnaires publics ou leurs semblables lorsqu’ils entrent en fonction ou à cette occasion, sujet de la partie trois sur les délits tels la corruption passive, la corruption active et les vols commis par les fonctionnaires publics ( Article 115 du C. P.), les délits d’irrégularité et de marchandage ( Article 258 du C.P.), les délits relatifs à la trahison ou les appropriations illégales ( Article 302 du C.P.).
Qu’en examinant les dispositions du décret contesté, est apparue la couverture de la mesure de la confiscation de toutes les personnes dont les noms figurent sur la liste adjointe, sans qu’il n’y ait eu de jugements pénaux émis à leur contre, les condamnant. Ceci, en considération que la justice, à la date de l’émission du décret et de la mise en exécution de ses mesures, demeure en charge des procès pénaux à l’encontre de ces personnes. Il en demeure qu’il n’est pas certain, que la justice en charge des procès cités, finisse par retenir les accusations contre toutes les personnes mentionnées sur la liste adjointe au décret. Qu’ainsi, le décret contesté est à considérer, non pas seulement en atteinte aux compétences qui reviennent au regard de la justice et non autrement mais également en tentative d’influencer les juges en charge des procès en cours. Ceci, dans le but de décider sur principe de la condamnation à priori contre toutes les personnes désignées dans ses dispositions. Ce qui est totalement contraire à la présomption d’innocence dont doit bénéficier tout citoyen tant que sa culpabilité n’est pas prouvée.
Qu’il aurait été judicieux, légalement, de se contenter de prendre des mesures préventives concernant ces propriétés, afin qu’elles soient préservées et dans le but qu’elles ne soient pas dilapidés, en attendant que la justice dise son mot dans les procès en cours, pénalement et civilement et qui concernent les personnes visées ainsi que les sociétés qui leur sont dépendantes. C’est une situation qui a été instruite de façon pratique par les entendus en urgence émis par la magistrature spécialisée concernant la désignation de deux administrateurs judiciaires sur les fonds et les acquisitions des personnes qui figurent sur la liste. Qu’ainsi, la confiscation, sujet du décret critiqué, devient dépourvue de toute valeur ou effet, tant au niveau juridique que pratique. Il est à considérer en mesure illégale qui se consacre à l’abus d’autorité, à la violation criante des dispositions de l’article 5 du C.P.,un déni des compétences de la justice judiciaire et une violation de la présomption d’innocence inscrite dans l’article 12 de la constitution.
Quatrième opposition : Nullité pour violation des dispositions organisatrices du droit de la propriété et des règles de la justice et de l’équité.
Qu’il est disposé dans l’article 7 de la constitution que tout citoyen jouit de tous ses droits par le moyen et les conditions que la loi désigne. Il ne peut être écarté de ses droits que par une loi qui soit prise pour respecter les droits d’autrui, dans l’intérêt de la paix générale, de la défense nationale ou du développement économique et de l’éveil social.
Qu’il est également disposé dans l’article 14 de la constitution, que le droit à la propriété est garanti et qu’il se pratique suivant les frontières de la loi.
Qu’il est disposé de même, dans l’article 20 du C.D.R.un principe général sur le domaine de l’acquisition de la propriété, énonçant que » Personne ne peut être contrainte de céder sa propriété », or le même article fait exception de ce principe du cas lorsque la loi décide en décide et en échange d’une compensation juste.
Qu’à l’exception de la soustraction pour le bien public, il n’existe dans la loi tunisienne aucun article qui tolère la possibilité de la confiscation générale des acquisitions sans une compensation juste ou sans un jugement pénal qui condamne en principal et qui énonce la confiscation au titre d’une condamnation complémentaire.
Que les dispositions des articles cités ci-dessus, n’ont nullement été respectées en substance du décret critiqué.
Qu’a énoncé ce décret, la confiscation de tous les fonds, les biens meubles et immeubles et les droits acquis après le 7 novembre 1987 qui reviennent à l’ancien président de la République, son épouse et le reste des personnes désignées sur la liste adjointe, mais sans aucune distinction entre ces acquisitions, les moyens de leurs acquisitions, l’envergure de la relation d’exploitation des individus cité de leurs liens, de leurs violations de la loi et des réglementations en cours ou à des droits des individus.
Que l’application des principes de la justice et de l’équité, exige la distinction entre les acquisitions légales des individus citées dans le décret et leurs acquisitions illégitimes. Car la relation familiale ou d’inter-mariage, ne suffit pas à elle seule de préciser que les personnes citées sur la liste aient pu obtenir des acquisitions illégales. Or, il est obligatoire de prouver leur exploitation de ces relations pour l’obtention de ces fonds de manière illégale. Ce, dont il ne peut être affirmé que judiciairement.
Qu’il n’est pas contenu dans le décret attaqué des articles qui proposent les moyens de recours pour former opposition à ses exigences devant la justice. Un fait inacceptable sous un régime qui tend à constituer un État de droits et d’Institutions. Autant que ceci est contraire à tous les principes constitutionnels, aux annonces, aux conventions internationales auxquelles est inscrit notre pays, qui fournissent l’aide à tout individu dont les droits ont été violés, les moyens d’y faire obstacle, même si les violations ont été commises par des individus au cours de l’exercice de leurs fonctions officielles. Nous rappelons à titre d’exemple, l’article 3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel notre pays s’est inscrit suivant la disposition de la loi n 30 -1968 du 29 novembre 1968, qui est entrée en vigueur internationalement le 23 mars 1976 conformément à son article 49, ou la Déclaration universelle des droits de l’homme qui énonce dans son huitième article, que toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi, tout comme le droit à la propriété.
Qu’il eut paru le 17 août 1957 une loi qui concerne la confiscation des acquisitions illégales. Toutes les garanties ci-dessus mentionnées ont été respectées. Ont été précisés les acquisitions qui devaient être confisquées avec des attributions suivant les spécialités de la confiscation qui s’est réalisée par la justice et non autrement, devant la Cour Suprême, devant qui, les personnes concernées par confiscation, pouvaient faire appel.
Que dans l’article 3 de la loi citée, il énoncé : « La Cour Suprême peut, concernant les individus matériels citée dans l’article 1, si éventuellement il s’avère qu’ils ont volontairement ou délibérément de commettre un acte contre les intérêts de la nation, de juger en prime, tenant compte de la dangerosité des actes que l’enquête détermine ou pour l’importance des gains obtenus, de confisquer toutes leurs acquisitions ou une partie ». Ensuite, le même article ajoute une insertion » Le contenu du jugement prononcé par la Cour Suprême sur la confiscation de tous les acquisitions ou en partie au journal officiel de la République Tunisienne« .
Que dans ce qui provoque la surprise et le trouble, il y a qu’après 54 ans, de la loi de 1957 concernant la confiscation, un autre texte, sur le même objet, qui est de moindre valeur et équité et qui contient toutes les transgressions à loi, démontrées ci-dessus.
Que si l’important dans ce contexte particulier que vît notre pays, était de marcher à pied sur le chemin de la réalisation des buts de la révolution, positivement , que cela ne doit pas nous faire oublier l’importance de la fonction législative et sa dangerosité sur l’avenir du pays. Il est de l’obligation de l’autorité qui a pris la place de l’ancien législateur, de faire attention à certaines erreurs qui peuvent amener vers la violation des droits de quelques citoyens. Qu’elle fasse preuve d’efficacité en conduisant un peuple qui a fait preuve qu’il est efficace. Il est de même de l’obligation du gouvernement de respecter les spécificités constitutionnelles de l’autorité judiciaire. L’indépendance de la magistrature et son équité, sont plus important que l’argent, car elles garantissent au citoyen sa dignité et lui permet l’équité. Si le conflit le réunit avec ceux de l’autorité, disent les savants, dans ce cas : « Un imam juste vaut mieux que de la pluie et des chameaux«
Que de tout ceci, il en résulte que le décret en opposition contient nombreuses violations qui imposent sa nullité. Qu’elles peuvent se résumer de la sorte :
→ Le décret contesté n’a pas été adopté par l’Assemblée des députés et son adoption est devenue impossible après l’expiration des délais légaux et surtout après la dissolution de l’assemblée citée.
→ Le décret contesté transgresse la nature légale de la confiscation en considération que c’est une condamnation complémentaire et par voie de conséquence, il représente une transgression non justifiée de la présomption d’innocence.
→ Le décret contesté est dépourvu d’un bien-fondé légal car, son champ concerne l’ordonnance d’une condamnation pénale, celle-ci dépasse le cadre de la procuration autorisée au président provisoire de la République. Il s’est consacré à excéder les compétences judiciaires en violation du principe de la séparation des autorités.
→ Le décret, objet du recours, a enfreint les principes constitutionnels organisateurs du droit de la propriété et il a transgressé les règles de la justice et de l’équité, sans justification.
Pour ces motifs
Prière à votre bienveillance d’accepter le recours pour excès de pouvoir et de prononcer la nullité du décret critiqué, en considération que c’est une décision administrative en infraction à la loi.]