Amel karboul rompt le silence

Salah Ben Omrane  04 décembre 2015   22:55

 Amel Karboul  Le nom et les images de l’ex-ministre du tourisme Amel Karboul, de l’ex-gouvernement de Mehdi Jomâ, ont refait surface récemment dans les médias tunisiens. Raison de sa réapparition : Son bilan à la tête du ministère du tourisme? Une comparaison de la façon dont le ministère est tenu en ce moment par Selma Elloumi Rekik ? Un compte rendu public affichant résultats et prouesses d’un gouvernement de technocrates dont on tant vanté les mérites le jour de son installation ? Aucune de ces raisons là!

 Les médias tunisiens ont totalement laissé tranquille Amel Karboul pendant presque un an. On ne peut pas dire que soudain, l’envie les a poussés d’aller briser une cure de désintoxication contre les effets néfastes du champ magnétique de la caméra ou qu’ils ont commis le sacrilège en prenant à défaut, dans son intimité, une dame en pleine cérémonie de débriefing propre à la surdose médiatique et à l’abondance de l’égo.

 C’est Amel Karboul qui a déclenché les hostilités. Elle a choisi 1.Le lieu : l’extérieur du sol tunisien, en l’occurrence l’Allemagne, 2.Le moment où tous les regards sont rivés sur la sécurité dans le pays, avant tout et en priorité des priorités, 3. La langue anglaise, 4. Une stratégie du style « je dis ça mais j’ai rien dit! » 5.Un public dans une salle qu’elle semble s’efforcer à vouloir lui exprimer qu’elle était une ministre talentueuse et courageuse qui s’est battue en héroïne pour que la Tunisie soit comme elle en rêvait.

 Si elle était en effet singulière du temps où elle était ministre, il faut se résigner à penser qu’il n’y a pas lieu de croire que cette singularité a pu faire bouger le secteur du tourisme. Elle n’a ni rempli les hôtels ni ouvert de nouvelles perspectives pour drainer de nouveaux touristes vers la Tunisie. Entendons nous bien, elle n’est pas la responsable des déboires que connait le secteur touristique. Le champ de son action faisait partie de la politique générale de son gouvernement avec une orientation et des actions sur le terrain où le ministère du tourisme n’était pas le confluent de toutes les ficelles. Le temps où elle était ministre était une parenthèse pleine de vacarme et des résultats pas reluisants du tout. Le nombre en prévision de touristes que la Tunisie allait accueillir en prévision, qu’elle avait péroré à ses début, tel un glaçon exposé au soleil, rapetissait au fur et à mesure que l’échéance de son départ du ministre s’approchait. Il y a également la taxe de séjour payable à la sortie du territoire par les visiteurs, malgré toutes les critiques qui ont été formulées contre son instauration, Mme Karboul se targuait en affirmant fièrement qu’elle en était l’instigatrice. Cette taxe avait fini par être abandonnée en août dernier et tant mieux que ce soit ainsi!

  C’est lors d’un TEDx* à Berlin,  qu’elle est revenue sur les circonstances dans l’organisation du pèlerinage de la Ghriba durant la période où elle était ministre du Tourisme. Nous avons isolé les deux minutes de son intervention qui ont provoqué la colère sinon l’agacement de nombreuses personnes parmi elles son recruteur au ministère l’ancien chef du gouvernement Mehdi Jomâ. La Député Samia Abbou a répondu directement du banc de l’Assemblée à la sortie médiatique de l’ancienne ministre. Nous avons transcrit les paroles dites en anglais, puis traduit le texte en français et en arabe pour qu’il n’y ait aucune confusion dans les intentions.

Traduction d’une partie de l’intervention de Amel Karboul:

 « Voici deux histoires. La première est arrivée lors de la préparation du pèlerinage de la Ghriba. Dans le sud de la Tunisie, se trouve la synagogue de la Ghriba. Une des plus anciennes dans le monde. Chaque année, pendant le passage, les Juifs entreprennent le pèlerinage. Je couvais ce rêve fou de recréer le 21 ème siècle de la Convivencia (cohabitation) pendant le pèlerinage. La Convivencia est la période entre 711 et 1492. L’âge d’or de la gouvernance islamique en Espagne, où Musulmans, Juifs et Chrétiens, ont vécu en paix, en dynamique et crée une société ! Je pensais que si nous réussissons à faire venir des Juifs du monde entier, y compris d’Israël, de sorte que dans des pays, des êtres humains parviennent à ce que l’attitude des gens change, peut-être même l’identité. Après de nombreuses années, étant coach de dirigeants, moi-même vivante en tant que minorité en Allemagne et ailleurs, j’étais emportée par l’idée qu’une fois vous avez la vision que l’être humain est un être humain, vous ne pouvez jamais le déshumaniser de nouveau ni le voir en ennemi. Étonnamment certaines personnes n’aimaient pas cette idée. En réalité, beaucoup de gens ne l’aimaient pas du tout cette idée. Je fus confrontée au désespoir. Mes enfants ont dû quitter le pays. À partir de ce moment jusqu’à la fin de ma mission, je devais me déplacer, vingt quatre heures sur vingt quatre,  sept jours sur sept, entourée de gardes du corps, même quand j’allais dormir. Puis, je devais aller à un vote de non confiance au parlement. Le premier dans l’histoire du pays. Avec cela, durant treize heures, un interrogatoire interminable devant la caméra de télévision en direct. Chaque mot, tout mouvement de mon visage était observé par des millions. Mais, nous n’avions pas failli par l’aide de l’ensemble du gouvernement et d’un millier, en réalité des centaines de milliers dans les médias sociaux. Nous avions non seulement passé le vote de confiance, mais encore, véritablement, de nombreux gens du monde entier, sont venus au pèlerinage: Musulmans, juifs et Chrétiens. Des individus, avec seulement leurs passés, leurs âmes et cultures, se sont rencontrés en êtres humains, sans haine, sans peur et sans préjudice. »

Le texte transcrit de la vidéo en anglais :

 « Here two stories. The first when happend while preparing the Ghriba pilgrimage.In the south of Tunisia stands the Ghriba synagogue. One of the oldest in the world. And every year, during the pass over, Jews undertake the pilgrimage. I hatch that crazy dream to recreate the 21th century of the Convencia during the pilgrimage. Convivencia is the time between 711 and 1492. The golden age of islamic governance in Spain where Moslims, Jews and Christians lived in peace and created a vibrant and create a society. I thougt if we succeeded in bringing Jews from all over the world, including from Israel, that some how, in countries between human being will happen, that will change people attitude and may be even identity. After many years as an executive coach, and myself living as a minority in Germany and elsewhere, I was carried away by the idea that one, you have the truly seen a human being as a human being. You can never again dehumanize him as an enemy. Surprisingly some people didn’t like that idea. Actually, many people didn’t like that idea at all. I was confronted with despair. My children had to leave the country. And from all that time until the end of my mission, I had to live tewenty four seven, surrounded by bodyguards, even when I went to sleep.  And I had to go to a non confident vote in the parliament. The first in the history of the country. With that, a thirteen hours in an unless interrogation in front of live tv camera. Every word, every movement of our face was observed by millions. But, we did not faulter with the help of the whole governement and of thousand, actually a hundreds of thousands in social medias. We did not only passed the confident vote, but actually, many people from all over the world came to the pilgrimage: Muslims, Jews and Christians. Individuals, with the unless background faiths and cultures met theirs human beings without hate, without fear, without prejedice.« 

 ترجمة جزء من مداخلة الوزيرة السابقة للسياحة في حكومة المهدي جمعة، امال كربول من الأنقليزية الى العربيّة :

« هنا قصّتان . الأولى جائت خلال إعداد الحج إلى الغريبة . في الجنوب التونسى توجد الكنيسة اليهودية الغريبة وهى واحدة من أقدم الكنائس في العالم. في كل عام أثناء العبور، يقوم اليهود بأداء الحج. كنت اطوّر هذا الحلم المجنون لإعادة فى القرن 21 ماتسمّى Convivencia (التعايش) أثناء الحج. فترة Convivencia هي المدة ما بين سنة 711 – 1492. أي العصر الذهبي للحكم الإسلامي في إسبانيا، حيث عاش المسلمون واليهود والمسيحيون في سلام وخلق حركيّة في المجتمع! اعتقدت أنه إذا نجحنا في جلب اليهود من جميع أنحاء العالم، بما في ذلك إسرائيل، فى صورة أنّه من بلدان العالم يأتي النّاس، تغيير مواقف الناس، وربما الهوية المحتملة. بعد سنوات عديدة كمدرّبة لرؤساء مؤسّسات ، وأنا أعيش كأقلية في ألمانيا وأماكن أخرى، كنت مجذوبة بفكرة ،أنه بمجرد أن يكون لديك رؤية حقيقية للإنسان كإنسان ، لا يمكنك أن تخلع منه إنسانيته أو تراه كعدو. بكل دهشة بعض الناس لا يحبون هذه الفكرة. في الواقع، الكثير من الناس لا يحبون هذه الفكرة على الإطلاق. واجهت اليأس. وُجب على أطفالي مغادرة البلاد. منذ تلك اللحظة وحتى نهاية مهمتي، اضطررت للتنقل ، أربع وعشرين ساعة على أربع وعشرين و سبعة أيام على سبعة أيام ، أن أكون محاطة بحراسه شخصية ، حتى عندما ذهابى النوم. ثم اضطررت للذهاب للتصويت على حجب الثقة في البرلمان. الأولى من نوعها في تاريخ البلاد. كان هذا،خلال مدّة ثلاث عشرة ساعة من المُسائلة بدون نهاية أمام الكاميرا التلفزيونية على المباشر. كل كلمة، كل حركة فى وجهي تشاهد من قبل الملايين .ونحن لم تفشل بااتعاون فى الحكومة بأكملها و بآلاف أو بالجدر بمآت الآلاف في وسائل الاعلام الاجتماعية. مّررنا لا فقط بالتصويت على الثقة، في الواقع، جاء الكثير من الناس من جميع أنحاء العالم، إلى الحج المسلمون واليهود والمسيحيين. الأفراد بماضيها و اجتمعت النفوس وثقافاتهم من دون الكراهية، دون خوف أو تحيز. »

 

  Revenons en arrière et rappelons nous le temps où Mme Karboul était à la Ghriba. Ce lieu magique qui pousse à la simplicité, à l’humilité et de s’égarer un instant dans ce lieu historique  fait pour le rafraichissement de l’âme. Qui pourrait croire un instant, lorsqu’elle parle devant les caméras que c’est une femme qui était en situation à risque, tel qu’elle le prétend aujourd’hui?  Le seul risque qu’elle courait à cet instant là, était d’oublier qu’elle était ministre, de s’abandonner à la plénitude du lieu, d’oublier Lesley  son amie, New York, le MOMA et De Kooning. 

 Voilà ce qu’elle avait dit : « Les rites peuvent être religieux, comme le Hajj à la Macque, le pèlerinage de la Ghriba, ou celui de Lourdes. Chacun de nous aussi célèbre ses petits pèlerinages personnels . Mon amie Lesley m’a racontée, qu’à chaque fois qu’elle va à New-York, elle fait un pèlerinage, le sien, au MOMA, Museum Of Modern Art, pour admirer une peinture de De Kooning, Pirate, qui l’inspire et lui donne envie de danser, à la grande consternation des agents du musée. Le tableau n’étant toujours pas en exposition, elle quitte le musée profondément déçue, lorsqu’il n’y figure pas. Et rapidement, écrit encore et encore une lettre au MOMA, la même, les priant de le sortir des caves et de le ré-exposer. parfois , il le font.« 

 Lesley a eu sa minute de gloire à la Ghriba cette année. C’est comme si elle y était. On imagine que Lesley vît à Londres et qu’elle se rend régulièrement à New York. On a appris qu’à chacun des déplacements de Lesly, dans cette ville, elle consacre une bonne tranche de son temps, qui certes doit être précieux, à la visite du musée d’art moderne.

Le thème la Convivencia, jaillit soudain aujourd’hui. Semble-t-il, elle prétend qu’il lui tenait à cœur et elle comptait l’amener sur le territoire de la Ghriba. Lorsque qu’elle avait consacré une bonne partie dans son intervention  à la citation de son amie devant une œuvre dans le stock du MOMA, voulait elle exprimer que faire référence à l’art moderne est moins dangereux que la citation de l’histoire ou tout simplement l’idée de rapprochement entre le pèlerinage  de la Ghriba avec la Convivencia, n’est venue que récemment et que ça fait son effet au cours d’un TEDx  ?

 Quant à l’évocation du peintre et sculpteur Willem De Kooning  par la ministre au cours du pèlerinage, un artiste qui a consacré  une quarantaine d’années de sa vie à tourner autour du corps de la femme, difficilement imaginable que ses œuvres puissent être accrochées dans ces lieux où tout le monde s’accorde que l’hymne doit être rendu à l’âme et à l’immatérialité de l’être et certainement pas à l’apparence de son corps. N’était-ce pas le signe que la même ministre, qui se décrit qu’elle était « confrontée au désespoir » lorsqu’elle était à la Ghriba, jouissait d’une carte blanche pour faire et dire tout ce qu’elle voulait, y compris de toucher à l’incongru et l’évocation du déplacé en toute sécurité. Voir les oeuvres de Willem De Kooning, dans un musée, est à recommander mais l’évoquer sur un lieu de culte, n’est il pas exagéré ? De Kooning lui même avait sa propre appréciation des mystères du présent, du figuratif, du trop humain selon Nietzsche, si on veut. Il estime  qu’il a en lui de l’abstraction qui copule avec la vulgarité.

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*TEDx acronyme de Technology, Entertainment and Design. Une organisation à but non lucratif américaine qui organise des conférences sur des idées et les sujets qui traversent et préoccupent le monde . L’organisation fournit le cadre et la salle de conférence et s’occupe du remplissage de la salle par le public. 

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