La Faculté des arts et des lettres de Manouba est assiégée par des barbus

Salah Ben Omrane , le mardi 29 novembre 2011 à 01:H05

 

Le Doyen de la faculté des arts, des lettres et des humanités de Manouba, Habib Kazdaghli.

À 8heures 10 minutes, ce lundi matin, la Faculté des arts des lettres et des humanités de Manouba, a été prise d’assaut par des individus étrangers à la fac. Ils sont arrivés discrètement par petits groupes. Devant la salle où se déroule l’examen des cours d’anglais, ils se sont regroupés avant de poursuivre leurs actions. Une sorte de quartier général d’où ils se sont répartis les tâches pour occuper la fac., pour ensuite, prendre la direction des autres salles .

Ils scandaient : «Seules celles qui portent le nikab peuvent entrer en premier». Il est cependant à préciser, qu’au cours d’anglais  aucune étudiante ne porte le nikab. Joignant leurs paroles aux gestes, ils se sont servis des tables pour dresser des barrages filtrants  en obstruant les passages.

Les enseignants, le personnel de la fac ainsi que les étudiants, ont été pris de court par cette invasion qui entrave le fonctionnement habituel de ce lieu d’études. Pour éviter que la situation ne dégénère, rapidement, les enseignants ont pris la décision après concertation, d’annuler les cours et les examens en les reportant à une date ultérieure, une fois que le calme  serait rétabli.

Cette décision n’a pas découragé les intrus, dès qu’il en ont pris connaissance. Au contraire, ils on vite fait de se mettre en contact avec l’extérieur, faisant appel à des renforts. À la minute, leurs vœux ont été exaucés. De nouveaux occupants, cette fois-ci bien âgés, la soixantaine et plus, les ont rejoint avec des banderoles. Et c’est à ce moment là qu’ils ont fait connaitre au doyen de la faculté et aux enseignants qu’ils ne sont plus libres de leurs mouvements et qu’ils sont privés de quitter l’enceinte de la faculté.

Ce coup de force qui frappe un haut lieu du savoir, n’a pas l’air de surprendre outre mesure, la majorité des Tunisiens qui ont l’air de s’habituer, sans broncher, sans protester, à cette prise du pouvoir par une fraction qui se réclame à la fois juge et justicière dans la rue et dans les lieux publics. C’est devenu routinier. La question que se posent de nombreux Tunisiens, n’est pas de savoir quand ce genre d’exaction va s’arrêter , mais qui sera au prochain tour et quand vont-ils frapper ?

Ils ont plus de pouvoir que n’importe quel juge ou policier car, ils cumulent ces deux fonctions et n’ont de compte à rendre à personne. Ils sont au dessus de la loi et, ils se sont investis de la charge de mettre les Tunisiens sur « le droit chemin » et ils tirent leur légitimité d’une atmosphère ambiante, à savoir ,la force est entre les mains des vainqueurs et, eux ils se situent au niveau de la conscience du parti vainqueur, dans les récentes élections. On est en effet, à l’opposé des racines et des buts mêmes qui ont poussé les Tunisiens  à se soulever. Mais en ce qui concerne la religion musulmane, dont ils prétendent s’en inspirer, pour l’attaquer et lui porter préjudice, on ne s’y prendrait pas autrement!

 N’ayant aucun obstacle sérieux qui les fait cesser de poursuivre leur entreprise de «purification éthique» de la Tunisie, il n’y a aucune raison objective pour qu’ils arrêtent. Il n’y a aucune raison pour qu’ils cessent, car même s’ils se font arrêter voire, se faire emprisonner, ils pourront se targuer plus tard, qu’ils sont des martyrs et revendiquer le statut de victimes. N’y a-t-il pas un meilleur argument, alibi, pour forcer l’admiration populaire et se faire élire dans quelques années ?

En attendant , les parents de ces étudiants qui n’ont pas vu leurs enfants passer leurs examens aujourd’hui, qui s’inquiètent et qui ne peuvent pas intervenir, même s’ils le souhaitent, doivent se plier à cet état de fait. Pour les consoler, il faut juste leur rappeler qu’ils ne sont pas moins impuissants , ni moins courageux que tout le reste du pays. Si c’était le contraire ,on l’aurait su. On les aurait empêché de récidiver dès qu’ils avaient commis leur première exaction. Il y a indiscutablement comme une volonté de pousser le pays vers la guerre civile derrière le mutisme généralisé ,quand ce ne sont pas des paroles empathiques qu’on entend par des hommes politiques à la télé, envers cette forme de nouvelle délinquance.

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